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Louis Jullien : La reconstruction (2)
Ils redescendirent au second étage, arrivèrent dans un espace de dimension modeste autour duquel il y avait trois portes surmontées des indications suivantes : à droite, « Administration générale », au centre, « comités » et à gauche, « espace de travail ». Jean ouvrit la porte face à eux. Ils pénétrèrent dans un bureau assez vaste, mais qui ressemblait à n’importe quel bureau : des meubles, des ordinateurs, des placards de rangement, des étagères. Ils furent conduits dans une pièce de grande taille meublée uniquement avec une grande table circulaire autour de laquelle devaient pouvoir prendre place une cinquantaine de personnes. Il y avait à peu près une vingtaine de personnes réparties autour de la table et nombre de sièges étaient vides.
La femme qui les avait accompagnés annonça :
– Louis Jullien et Jean Berthon.
– Merci Caroline, dit une femme assise face à eux. Elle continua : Louis, assieds-toi face à nous sur le siège situé devant toi. Jean, viens t’asseoir à côté de moi.
Ils prirent place. Elle reprit :
– Bienvenue parmi nous, Louis, je m’appelle Clémentine Leroux et préside aujourd’hui cette session du comité. Nous allons commencer par un rapide tour de table que tu termineras, pour nous permettre de nous connaître, puis nous enchaînerons sur le déroulé du comité au cours duquel nous aborderons les points suivants : Nous te donnerons une vue rapide sur le fonctionnement de notre organisation et de ses règles, tu nous parleras ensuite de ton projet de vie ou de tes aspirations, nous t’exposerons enfin notre vision de notre collaboration, tu nous donneras ton sentiment sur nos propositions. Ensuite, nous délibérerons et te donnerons nos conclusions à l’issue. Mais commençons !
Clémentine se retourna vers son voisin de droite et l’invita d’un regard à se présenter.
– Bonjour Louis, je m’appelle Jérémie Brousseau. Je fais partie du cercle Gouvernance et Éthique de la ville. Je siège également au Conseil national de gouvernance en tant que représentant des villes nouvelles où j’y apporte ma contribution pour l’harmonisation du fonctionnement global de nos structures qui étaient très hétéroclites au départ et qui doivent continuer à converger si nous voulons une unité dans notre projet. Je suis marié, trois enfants, nous habitons cette ville, avons rencontré le bonheur ici et ne souhaitons plus reprendre notre vie d’avant.
– Bonjour, je m’appelle Isabelle Macé, mariée, sans enfants. Avec mon mari, nous sommes entrés dans ce projet un peu par hasard, comme toi, il y a maintenant deux ans. À mon arrivée, j’avais sollicité une fonction dans l’administration de la ville et défendu ma demande devant un comité comme celui qui s’est réuni pour toi aujourd’hui. Aujourd’hui, je suis élue représentante du cercle d’administration de la ville, dont je fais partie, auprès du comité de Gouvernance de cette ville. Je te souhaite la bienvenue parmi nous.
– Bonjour Louis, moi, c’est André Caillat. Je suis le responsable local du cercle de production agricole. Cela veut dire que nous produisons une partie des denrées alimentaires qui vont servir à satisfaire les besoins alimentaires de cette cité.
– Liliane Labègue, responsable du cercle d’éducation. Nous avons aplani les barrières entre les différentes catégories de personnes. Il n’y a plus d’étudiants ni de travailleurs, uniquement des acteurs dans la cité et des personnes qui se forment ou qui transmettent leurs connaissances, quel que soit leur âge. Comme tu le découvriras par toi-même, tu vas être obligé de te remettre en question tout au long de ta vie avec nous et auras besoin de te former pour acquérir des compétences nouvelles, des technologies différentes. Il n’y a plus vraiment de notion d’enseignant et d’élèves. Ceux qui savent expliquent aux autres, quels que soient leur qualification ou leur âge. Si tu fais partie de notre cercle éducation / instruction, tu auras le devoir de te dépasser en proposant à tes élèves des matières plus générales, comme la littérature, les mathématiques, la géométrie, la technologie ou l’architecture. L’obligation d’enseigner oblige à maîtriser les sujets et cela conduit au dépassement de soi.
Clémentine savait que Liliane était intarissable sur ce sujet qui la passionnait. Elle profita d’une de ses reprises de respiration pour l’arrêter en disant :
– Merci Liliane.
Arriva le tour de Jean Berthon.
– Tu connais Jean. Tu as déjà eu l’occasion de le voir en action lors de la présentation parisienne de notre association. Jean a plusieurs activités, mais il travaille principalement à la construction de la ville. Jean a également une activité dans un restaurant collectif et assure une mission d’intérêt général en allant de ville en ville pour faire la promotion de notre association. Vois-tu quelque chose à ajouter ?
Jean fit non de la tête. Elle reprit la parole :
– Comme déjà indiqué, je suis Clémentine Leroux. Je fais partie du cercle de gouvernance et administration générale de la ville et suis, à ce titre, autorisée à présider cette séance.
Clémentine aimait bien donner un côté solennel à ces comités. Cela impressionnait en général les postulants et donnait tout le sérieux qui convient à cette instance. Elle était fière de ne jamais avoir encore essuyé de refus, ce qu’elle aurait considéré comme un échec personnel. Clémentine continua :
– Notre job, en tant qu’administrateur général de la ville consiste à régler toutes les questions relatives à la cité : habitation et construction, définition des besoins, mise en place des processus économiques, transport, etc. Cela ne veut pas dire que nous nous impliquons personnellement et activement dans chacun des sujets que nous portons, mais nous intervenons un peu comme chef d’orchestre : mise en adéquation des besoins avec les ressources, mise en place de processus, génération de valeur ajoutée. Nous intervenons également comme conseillers dans les arbitrages lors de la mise en place ou la réorientation de processus. Tu te demandes sans doute quels sont ces processus dont je parle ? Prenons un exemple : tu as la mission de faire manger deux mille personnes chaque jour. Il s’agit de ce que nous appelons un besoin fonctionnel. Ce besoin est validé par le cercle Ethique et Gouvernance comme étant conforme à nos règles. Tu vas ensuite avoir besoin d’un local, donc cela nécessite un projet de construction ou d’aménagement. Tu auras besoin de matériels. Un autre cercle arbitrera s’il est plus opportun d’acheter ce matériel ou de le fabriquer par nous-mêmes, ce qui générera un nouveau besoin fonctionnel. Et ainsi de suite : denrées alimentaires correspondant aux règles d’alimentation élaborées avec les habitants et d’autres contraintes plus économiques, mise en place des processus de fabrication et de distribution des repas, processus de formation et de renouvèlement des postulants, etc.
Clémentine aurait pu parler des heures de son association avec ses méthodes, mais dut mettre un terme à son discours.
– Notre cercle a également comme mission d’instruire toutes les suggestions qui lui sont faites à la condition que ces demandes ne soient ni partisanes ni destinées au profit d’un individu. Venons-en un peu à toi. Jean nous a fait part lors de sa demande d’audience que tu étais un accidenté de la vie et que tu n’avais pas d’attaches particulières ou de choses qui te retenaient à Paris. Nous souhaitons que tu nous livres le plus d’informations que tu pourras porter à notre connaissance, si tu le souhaites, bien entendu, afin que nous évaluions le plus objectivement possible ce qu’il convient de te proposer si tu souhaites rester avec nous. Mais maintenant, écoutons ce que tu as à nous raconter.
Clémentine prit un air grave et attentif. Louis se lança un peu intimidé.
– Je m’appelle Louis Jullien, je suis dans ma trente-septième année. J’étais marié avec deux enfants, mais ma femme a demandé le divorce et je n’ai plus le droit de revoir mes enfants.
Clémentine fronça légèrement les sourcils et un murmure de désapprobation parcourut l’assistance. Qui pouvait s’arroger la prérogative d’interdire à des enfants de voir leur père ? Il poursuivit :
– J’ai travaillé pendant six ans dans une grande entreprise de distribution, puis j’ai eu un accident de la route et cela a brisé ma carrière d’abord, ma famille ensuite.
Louis raconta dans le détail ses aventures et mésaventures. Cela faisait longtemps que personne ne lui avait donné l’occasion de s’exprimer sur ce sujet. Clémentine écoutait ce garçon qui racontait ses malheurs en parlant d’une voix agréable et policée qui montrait son degré d’instruction. Elle se dit qu’elle avait en face d’elle « une pointure ».
Pris dans son récit, Louis prenait progressivement de l’assurance. Il leur avait expliqué sa descente en enfer, la rue et la « galère », les jours qui avaient précédé sa rencontre avec Jean, l’espoir, comment il avait vécu son arrivée à Libertyville.
La fin de sa présentation fut suivie d’un long silence. Clémentine observait du coin de l’œil Liliane qu’elle savait émotive et qui avait les yeux embués. Après ce temps de méditation, qui dura quelques minutes, elle rompit le silence et dit :
– Louis, ta présentation nous a beaucoup touchés. Sache que je défendrai ta candidature afin que, même si tu décidais de nous quitter un jour, tu aies la possibilité de te réinsérer dans la société.
Elle marqua de nouveau un temps de silence. Il y eut dans le groupe un murmure d’approbation, puis elle enchaîna :
– Nous allons t’expliquer brièvement le fonctionnement de notre association et les grandes règles qui y sont associées, droits et devoirs. Je demanderai également à ce que Jean, si son emploi du temps le permet, t’explique dans le détail notre fonctionnement. Lorsque tu te sentiras prêt, tu demanderas à nous rencontrer à nouveau et cette fois, c’est toi qui devras nous impressionner.
Jean opina du chef, indiquant que de son côté, il était d’accord. Clémentine était captivée par Louis. Bien qu’il fût tout « cabossé » par la vie, il pourrait très certainement prendre en charge un certain nombre d’activités ou « processus économiques ». Elle garda ses réflexions pour elle et reprit avec fougue :
« Nous vivons dans une,… comment l’appeler, ce n’est pas une société, pas une communauté… je dirai quand même une communauté dans la mesure où nous partageons beaucoup de choses. Les grands principes qui régissent notre communauté sont : la participation obligatoire de chacun dans le projet de vie, pas d’argent comme métrique pour les compensations, le remplacement de la notion de produit par la notion de besoin fonctionnel, la propriété collective des équipements et immeubles, une participation financière obligatoire des parties prenantes, une mise à l’épreuve d’un an minimum. Il y a plusieurs niveaux de participation dans cette communauté : les simples investisseurs qui ne participent pas au projet de vie et qui n’ont d’ailleurs pas de droits en termes de services dans cette organisation hormis ce qui est défini contractuellement. Viennent ensuite les parties prenantes logements : ce sont des personnes qui ont souhaité résider dans notre ville, mais qui ont une activité économique à l’extérieur. Nous pratiquons un système de loyer-capitalisation qui empêche toute forme de spéculation et qui inclut logement, alimentation et éducation. Les parties prenantes logement ont comme obligation de consacrer une journée par semaine et par personne à la collectivité. Cela revient à une forme d’impôt, mais non versée en argent. Nous transmettons ainsi les règles de la vie en communauté par une participation directe des parties prenantes.
Les membres de la communauté participent au fonctionnement de notre organisation. Chaque membre de la communauté a l’obligation de s’impliquer dans, ou développer, un processus économique. Ce sont ces processus économiques qui permettent à notre organisation de survivre. Les membres ne sont pas exposés directement à l’argent lorsqu’il y a des échanges économiques avec une organisation extérieure. Une partie de la valeur ajoutée des processus économiques revient à l’intéressé sous forme de logement ou d’alimentation, une autre partie est stockée sous forme de capitalisation, quoique je trouve le mot plutôt vulgaire. Le reste de la valeur ajoutée revient pour partie à l’organisation pour lui permettre de se développer et pour une part est affectée au titre de la solidarité. Il n’y a pas de lien entre la valeur produite et le niveau de services, ce qui fait que chacun concourt à la production globale et reçoit un niveau de service identique à d’autres. Ainsi, il n’y a pas de différences entre les membres. Tu as la possibilité de transformer un peu de ta capitalisation en vrai argent pour les cas où tu serais confronté au le monde extérieur et nous te laissons bien entendu la liberté de conserver quelques heures d’activité à l’extérieur à condition, bien entendu que cela ne se fasse pas au détriment de tes engagements envers nous. Si par exemple tu décides de voyager et que cela ne rentre pas dans les critères de l’association, tu auras la possibilité d’acheter un billet de train ou d’avion avec. Nous avons mis en place, par exemple, des systèmes internes de location/réservation de voiture qui t’évitent d’avoir à convertir ta capitalisation et qui évitent de t’exposer au système marchand. Dans le monde d’où tu viens, on appelait cela des « arnaques », d’autres parlaient de business. Je vais te donner un autre exemple : nous possédons des immeubles sur le littoral atlantique. Une partie des logements est réservée à des séjours de courte durée que nous ouvrons au public dans la mesure où les toutes personnes acceptent les règles de notre association. Tu as la possibilité de convertir une partie de ta valeur ajoutée en séjours dans ces immeubles. Nous avons négocié avec différents opérateurs de transport des trajets achetés en masse de façon à ne pas exposer nos adhérents à des tarifs fluctuants en fonction des saisons.
Enfin, nous avons une catégorie à laquelle tu vas appartenir pendant quelque temps : les solidaires. Chacun apporte son concours au titre de la solidarité en fournissant des repas, par exemple, ou des jours de travail solidaires. Cela ne veut pas dire que tu ne feras rien en échange, tu auras des obligations envers la communauté, mais hors des processus économiques ou de production. L’accès à ces activités est soumis à l’approbation de comités ou cercles : le nôtre, un comité d’habitants et un comité d’accès aux processus économiques. Ces activités sont principalement des activités de service à la collectivité : entretien des espaces collectifs, éducation et formation, transports urbains, et bien d’autres encore.
Qui sont les solidaires ? Pour une partie, il s’agit des femmes et des hommes comme toi, que la vie n’a pas épargnés et que nous accueillons en notre sein au titre de notre action humaniste. Cela permet de les réinsérer dans un milieu différent du modèle que tu as connu jusqu’à présent ; ce milieu qui ne te reconnait que comme employable, c'est-à-dire ayant un profil, un comportement et des aptitudes spécifiques nécessaires à la survie dans le modèle économico-financier. Pour l’autre partie, il s’agit de volontaires qui souhaitent prendre en charge l’éducation et l’instruction pour lesquelles nous avons réservé une grande place dans nos organisations ou souhaitent œuvrer dans des tâches d’intérêt général.
Nous procédons avec ce système de comités car chaque membre ayant obligation de participer à la vie de la communauté, ce sont des milliers de jours de travail qui sont ainsi produits et consommés par l’organisation. Par exemple, Jean, qui est à mon côté, dispense des cours d’architecture et de gestion de projet sur son temps d’activité collective. De ce fait, nous avons un besoin réduit en matière d’enseignement dans cette matière à Libertyville et Gammaville. Les « élèves » de Jean suivent cette formation dans le cadre de leur métier, d’un souhait de reconversion, ou tout simplement pour accroître leur culture personnelle. Il n’y a pas de barrière entre élèves et actifs. Chacun est libre de suivre un module d’enseignement. Nous aménageons les activités en fonction de ces souhaits. Il y a deux types d’enseignements : ceux qui amènent à la connaissance et à des compétences métiers et ceux qui donnent une équivalence universitaire reconnue, quantifiée par l’obtention d’unités de valeur.
Cette catégorie, les solidaires, nous permet d’accueillir les exclus du monde économique marchand et de les intégrer dans des projets en adéquation avec leurs possibilités, ou bien de leur donner la possibilité de développer de nouveaux projets en leur apportant les moyens nécessaires pour les réaliser. C’est d’ailleurs ce que nous imaginons pour toi. Ces processus que je suis en train de t’expliquer ont permis de donner une activité à chacun et, de fait, il n’y a pas de chômage à Libertyville. Cela résout également l’épineuse question des retraites. La retraite est considérée, pour une bonne partie des individus comme le seul moyen de sortir de l’emprise économico-financière en garantissant qu’ils auront un moyen pour survivre à l’exposition à la spéculation de la société de consommation. Cette modélisation, bien qu’assouplie ces dernières années, n’est pas viable car les retraités vivent en dépendance des personnes actives dans les entreprises marchandes pour les salariés du privé, et en dépendance de l’état, donc de l’impôt pour les salariés du domaine public. L’argument laissant à penser que chacun cotise pendant sa période d’activité pour financer ses périodes d’inactivité futures n’est qu’un leurre. Ce système est, de plus, basé sur un besoin d’augmentation du nombre de personnes actives et la croissance, mais il semble que nous en ayons atteint les limites, surtout depuis la grande crise, et il ne sera à notre avis bientôt plus possible d’y faire face. Notre système à nous ne repose pas sur l’employabilité mais sur l’activité. Il nous a semblé tout à fait raisonnable de proposer des activités adaptées à des personnes à capacité réduites du fait de leur âge ou de certaines inaptitudes physiques. Ainsi, chacun conserve une activité et une existence sociale, ce qui n’est en général pas le cas dans le système traditionnel où il est même, parfois, interdit de travailler si l’on ne veut pas perdre le bénéfice de sa pension.
Il y a une dernière catégorie de solidaires : ceux qui se sont investis dans notre organisation et qui ne sont plus aptes, pour une raison ou une autre, à assurer une quelconque activité. C’est assez rare car chaque individu conserve, en général, une aptitude à faire quelque chose. Ces personnes sont totalement prises en charge par la collectivité avec un mode de solidarité dont je t’ai parlé précédemment. »
Clémentine marqua une pause après ce long exposé.
– C’est uniquement pour éviter les effets d’aubaine et le parasitage de l’organisation que nous exigeons que l’accès à la solidarité et le maintien dans ce statut soient validés par plusieurs instances.
Louis écoutait avec une grande attention ces explications, cherchant les éventuels pièges, histoire de ne pas « se faire avoir », comme on le disait dans son ancienne vie professionnelle.
Comme si elle avait lu dans les pensées de Louis, Clémentine ajouta :
– Louis, je tiens à te préciser, comme cela t’a certainement été dit, que dans notre structure, tu n’es pas consommateur, mais acteur. Tu y trouveras donc ce que tu nous apporteras. Comme il n’y a pas de notion d’argent dans les échanges, il n’y a pas de tentation à la dérive de surévaluer un produit pour obtenir un bénéfice plus conséquent d’un côté, et d’un autre côté, le risque de se faire « rouler » lors de l’acquisition dudit produit. Tu devras te défaire, si nécessaire, de tes vieilles habitudes de valorisation systématique de chaque chose, à moins que tu ne sois exposé au monde extérieur, mais dans ce cas, nous aurons l’occasion de rediscuter des règles de déontologie liées à cette activité et des stratégies à mettre en place avec les cercles spécialisés qui constituent des portes d’entrée/sortie avec le monde extérieur. As-tu des questions ?
Louis se tut quelques instants, puis reprit la parole :
– Cet échange était très enrichissant. J’ai appris plus de choses dans une seule journée que dans toutes ces années dernières.
– Et encore tu n’en es qu’au début de ton apprentissage. À moins que tu n’aies des questions particulières, je te propose de nous laisser quelques instants pour délibérer.
Jean se leva. Louis en fit de même. Jean dit :
– Viens, je t’accompagne !
Ils quittèrent la pièce et se dirigèrent vers un petit salon. Avant de repartir, Jean lui dit :
– Je reviendrai te chercher, puis il s’éloigna en direction de la salle du comité.
Une vingtaine de minutes plus tard, Louis fut prié de rejoindre la salle du comité. Clémentine l’invita à s’assoir puis reprit la parole.
– Louis, le comité te fait la proposition suivante : tu consacreras ta première année de présence chez nous à l’élaboration d’au moins un projet à vocation économique. Nous t’apporterons notre concours dans cette tâche et Benoît Brunet, ici présent, a accepté d’être ton tuteur. À l’issue de cette année de préparation, tu te présenteras devant nous pour nous exposer ton ou tes projets. Bien entendu, tu pourras nous solliciter quand tu le souhaites pour des demandes d’assistance ou d’arbitrage. Tu devras ensuite mettre ton ou tes projets en œuvre. Tes responsables de cercles nous feront un compte-rendu de tes progrès. Si tu es élu représentant de cercle, cette tâche te reviendra. Sache dès à présent que ta participation à des projets nouveaux ne s’arrêtera jamais et que tu devras développer de nouvelles activités, quitte à en abandonner certaines que tu auras amenées à maturité et que tu auras la possibilité de transmettre à d’autres membres qui n’ont pas nécessairement la capacité de développer des activités, mais savent les faire fonctionner. Comme tu es rentré en contact avec notre organisation par l’intermédiaire de Jean, nous proposons de te confier dans un premier temps à ses bons soins. Comme il te l’a certainement déjà dit, il travaille pour partie dans un restaurant collectif. Tu y prendras ton service dès demain si bien sûr tu acceptes notre offre. Pour les travaux d’intérêt collectif, tu participeras dans un premier temps à l’entretien de ta section de bâtiment. Une fois que tu auras mieux appréhendé notre fonctionnement, tu pourras ensuite postuler sur d’autres activités en fonction des opportunités. Mais il est bien de participer à un grand nombre d’activités car cela donne une bonne visibilité sur ces tâches collectives.
Clémentine se tût un instant, puis elle reprit d’une voix qu’elle espérait dépourvue d’émotions, mais chaude :
– Louis, acceptes-tu notre proposition ?
– J’accepte.
– Alors bienvenue chez toi, Louis.
Clémentine ajouta, plus détendue :
– Tu verras avec Benoît et Jean pour les questions paperasses. Je pense que tu as maintenant envie de te reposer un peu après toutes ces émotions, aussi je vous propose de lever la séance.
Les membres du comité commençaient à se lever ; elle ajouta en élevant la voix :
– Mesdames et messieurs, je vous rappelle que nous nous retrouvons ici même demain à neuf heures, à l’exception de ceux qui sont retenus de façon impérative par leurs activités. Je souhaite à tous une bonne soirée.
Elle se leva, signifiant que la réunion était terminée. Les rendez-vous furent pris pour le lendemain. Jean dit à Benoît :
– Louis est mon invité ce soir.
A suivre…
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