14 Avril 2019
Je réagis à l'annonce ce jours des tests d'un lanceur d'engins spatiaux en altitude. Voici un extrait de ce que j'écrivais il y a quelques années dans le livre Les bâtisseurs de Bonheur :
"Ils assistèrent ensuite au débranchement des gros tuyaux de remplissage de l’appareil. Un opérateur au sol, casque audio rouge vif sur les oreilles, relié avec un fil à l’appareil, était en discussion avec les pilotes.
Quelques instants plus tard, un convoi d’autobus se présenta sur la droite de la navette. Les passagers, vêtus d’une combinaison spatiale blanche, en descendirent, casque sous le bras, et se regroupèrent un peu à l’écart. Comme ils se savaient observés par des postulants, ils s’appliquaient tout particulièrement. Ils se rassemblèrent pour un dernier briefing avant l’embarquement qui avait lieu à l’extérieur lorsque le temps le permettait.
[...]
Sans transition, l’écran s’était rempli avec l’intérieur de la cabine de pilotage de la navette qui ressemblait à s’y méprendre à la cabine d’un avion, mais un peu plus grande. Elle présentait une instrumentation très importante. La projection montrait les dernières séquences de préparation avant le décollage, puis la manœuvre d’accrochage de la navette sous le gigantesque propulseur, une espèce d’énorme avion qui ressemblait à un U inversé et qui la recouvrait en totalité.
– Le propulseur est piloté, disait leur officier, et retournera au sol une fois la séquence de lancement terminée, pour effectuer de nouvelles missions. Ils vont se mettre en mouvement dans quelques minutes.
La bande-son donnait les échanges verbaux entre les pilotes et la base dans une langue qui leur paraissait incompréhensible.
– Il s’agit de la langue internationale de l’espace que vous allez apprendre prochainement, dit l’officier.
[...]
La retransmission montrait le pilote qui branchait l’intercom avec la navette et annonçait aux pilotes et aux passagers :
– Mesdames et messieurs les passagers de la navette Orion, ici le commandant Lejeune, pilote de votre propulseur. Nous allons débuter notre roulage. Nous décollerons à la vitesse de cent-cinquante nœuds et atteindrons notre altitude de lancement de trente-mille pieds dans quarante minutes environ. Je vous souhaite un agréable voyage.
Le plan suivant était centré sur le pilote du propulseur qui annonçait dans son micro :
– Début du roulage.
Il poussa la quadruple manette des gaz d’un cran vers l’avant. Le lourd appareil se mit à rouler lentement puis se mit en position sur la piste. L’homme annonça pour les deux appareils et leurs passagers :
– Décollage !
François regardait la retransmission sans en perdre une miette. Sa formation de journaliste reprenait le dessus et il faisait dans sa tête une rapide synthèse des événements qui se déroulaient devant lui. Il était impressionné par ces prouesses technologiques.
Dans la cabine du propulseur, le pilote mettait plein gaz. Le copilote annonçait les paramètres de vol :
– Vitesse cent nœuds… Vitesse cent-cinquante nœuds…
– Début de montée, dit le pilote en ramenant le manche vers lui.
La caméra se focalisait sur le nez de l’appareil qui commençait à s’élever, puis les caméras de contrôle situées sous les ailes montraient les roues qui se détachaient du sol. Le plan revint sur le pilote qui tenait fermement le manche qu’il inclinait légèrement vers la droite pour compenser les effets du vent.
– Décollage terminé, dit le copilote.
– Rentrez les trains d’atterrissage…
– Trains rentrés !
– Informez Navette… ordonna le pilote.
– De Propulseur deux à Navette Orion !
– Ici navette Orion, nous vous écoutons.
– Début de montée pour trente minutes avant mise en palier.
– Bien reçu, propulseur deux.
Les deux appareils, filmés depuis l’extérieur, s’élevaient lentement. La navette était visible à l’intérieur des parois du propulseur. Ses ailes dépassaient de part et d’autre du gros appareil. Cela donnait à l’ensemble une allure étrange, comme s’il avait quatre ailes.
Pendant les trente minutes de montée, ils visionnèrent d’autres films sur la vie et les métiers sur la Lune, puis le sujet revint sur le lancement en cours et se focalisa sur les pilotes de la navette.
– Fin de montée... Navette Orion, de Propulseur deux.
– Parlez, Propulseur deux.
– Nous sommes à l’altitude de largage. Notre vitesse est stabilisée à quatre-cents nœuds, en palier à trente-mille pieds.
– Reçu, Propulseur deux. Nous démarrons nos moteurs… Moteurs opérationnels. Prêts pour largage.
– De… Propulseur deux, procédons au déverrouillage de vos ailes.
Les bras de maintien en position des ailes de la navette se rétractèrent. À partir de là, elle ne tenait plus au lanceur que par son attache supérieure. Un voyant vert s’alluma sur le tableau de bord du propulseur.
[...]
« Préparez-vous au largage ». Dans les secondes qui suivirent, François eut l’impression de flotter dans sa combinaison, que son cœur remontait au bord des lèvres, puis d’être littéralement écrasé au fond de son siège lorsque les réacteurs montèrent en puissance et de passer de la position assise à la position allongée lorsque la navette prit la direction de la Lune. Quelques minutes plus tard, la pression se fit moins forte et le pilote annonça : « Nous venons de sortir de l’atmosphère terrestre et notre vitesse est stabilisée à dix-mille kilomètres-heure. Bienvenue dans l’espace. »
(Extrait du roman Les Bâtisseurs de Bonheur)
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